Palme d'or à Cannes en 2023, Anatomie d'une chute écrit est réalisé par Justine Triet raconte la chute d'un homme du 2ème étage de sa maison mais aussi la chute d'une famille qui se délite.
Sandra, Samuel et Daniel vivent dans les Alpes, dans un chalet un peu isolé. Sandra et Samuel sont tous les deux des écrivains, mais, elle a du succès alors que lui a du mal à aller au bout de son écriture. Daniel, leur fils unique, est devenu aveugle suite à un accident de voiture. Cet accident a bouleversé l'équilibre déjà fragile de la famille. Mais ce n'est pas cet épisode qui nous est montré mais le décès de Samuel retrouvé mort devant le chalet.
Ce qui est remarquable dans le film, c'est la mise en scène. Et pourtant le reproche que je lui fais c'est de manquer de point de vue. C'est un peu contradictoire mais je vais m'expliquer.
J'ai été touchée par l'utilisation de la bande son. Par exemple, le film commence et se termine par le bruit des pattes du chien sur le sol de la maison. Je trouve ce simple son, à la fois doux et rassurant. Dans le film, il n'y a pas d'usage excessif de musique d'ambiance, mais chaque son trouve sa place. Il y a également un travail sur le cadrage et sur la taille des plans.
Par contre, je n'ai pas aimé la scène centrale du procès et le manque de point de vue. Le procès me semble très théâtralisé, et assez caricatural. Les deux avocats surjouent leur rôle et les arguments sont très légers. Je me dis que, soit il fallait en faire un film de procès et beaucoup plus travaillé les échanges verbiales, soit ne pas montrer le procès et axer sur l'enquête policière ou sur la vie de famille. Le choix de montrer si peu la vie de famille dans le chalet, sans choisir de suivre un ou deux personnages, m'a semblé manquer de profondeur et du coup, je n'ai pas eu d'empathie sur les personnages. Je n'ai pas eu l'impression de suivre les états d'âme de Sandra ou ceux de Daniel. Cela m'a manqué.
Toutefois, une scène centrale du film m'a touché et beaucoup marqué. Le jury du procès entend et nous, spectateurs, voyons une dispute entre Sandra et Samuel dont il a enregistré le son. Les arguments que l'homme et la femme se renvoient sont assez classiques dans un couple : la répartition des tâches, de la charge mentale, la place de chacun, la répartition travail/vie privée... L’originalité est l'inversement des positions. Samuel porte la charge mentale classique d'une femme, tandis que Sandra lui oppose des arguments typiques d'un homme qui ne comprend pas pourquoi il prend des responsabilités à sa charge. Son succès littéraire à elle ne laisse pas la place à sa créativité à lui. Deux écrivains sous un même toit cela engendre de la jalousie. L'écriture nécessite du temps et un cerveau disponible (en dehors de toutes les choses du quotidien). Cette scène m'a beaucoup marqué et j'ai trouvé cet échange assez original et bien écrit.
Le rôle du petit garçon, Daniel est très bien interprété. Mais finalement, si la réalisatrice avait choisi de tout montrer de son point de vue, le film aurait gagné en profondeur et en émotion. Les quelques scènes où il est au centre de l'action m'ont vraiment touché. Il réfléchit, essaie de décortiquer les preuves, d'avoir un avis. Cela aurait été passionnant de suivre son raisonnement tout au long du film.
Je ne suis pas totalement convaincue par le film, mais il y a plusieurs propositions intéressantes. Cela mérite de le voir et d'en discuter.